Nagasaki, kiun mi vidis en la aĝo de 10 jaroj

Publié le par DesVeys

Ce texte est le témoignage d'une rescapée du bombardement atomique de la ville de Nagasaki le 9 août 1945. Elle avait dix ans...

Ce texte nous a été communiqué par M. Hori Jasuo espérantiste japonais à l'occasion de l'anniversaire du bombardement de NAGASAKI en août 1945. Il nous a semblé intéressant  de le publier intégralement en l'accompagnant de sa traduction française  ci-dessous en vert.

Rakontita de sinjorino Ŝimohira Sakue, 87-jara, loĝanta en Nagasaki, tradukita el la artikolo de la ĵurnalo "Asahi" la 24an de oktobro 2019.

(Raconté par madame Ŝimohira Sakue, 87ans, habitant à NAGASAKI, traduit d'un article du journal "Asahi" le 24 octobre 2019)

 

  

Jam pasis 40 jaroj post kiam mi komencis rakonti pri la teruro de nukleaj  armiloj. Ankaŭ nun mi rakontas al la lernantoj , kiuj vizitas la urbon Nagasaki.

(Il y a déjà 40 ans que j'ai commencé à parler de la terreur des armes nucléaires. Encore maintenant j'en parle aux étudiants qui visitent la ville de Nagasaki.)

 Kiam mi estis 10-jara en la elementa lernejo Ŝirojama en Nagasaki, mi estis atombombita. En tiu aŭgusto preskaŭ ĉiun tagon sirenoj alarmis nin pri la aeratako de usonaj bombaviadiloj, tial mi pasigis multajn horojn en la ŝirmejo 500 metrojn for de mia hejmo en la distrikto  Aburagi. La distrikto situis 800 metrojn for de la epicentro  de la atombombado. Mia patro laboris en la urbo Isahaja kiel militlaboristo.  Ĉiun matenon li ekiris je la 4a matene kaj revenis hejmen je la 10a vespere.

J'avais 10 ans à l'école élémentaire de  Ŝirojama à Nagasaki quand j'ai subi le bombardement atomique. En ce mois d'août, les sirènes nous alertaient presque chaque jour des attaques aériennes des bombardiers nord-américains, j'ai donc passé de nombreuses heures  dans l'abri à 500 mètres de ma maison dans le district d'Aburagi. Le district se situait à 800 mètres de l'épicentre du bombardement. Mon père travaillait dans la ville d' Isahaja comme employé de l'armée. Chaque matin il partait à 4 heures et revenait le soir à 10 heures.

La 9an de aŭgusto, matene, sireno alarmis nin pri la aeratako, sed mi ne volis iri al la ŝirmejo kaj ludis en la domo apud la patrino. diris al mi: "Mi antaŭsentas ke hodiaŭ vere okazos aeratako", kaj hastigis nin kaj mian 8-jaran fratinon kun1-jara nevo al la ŝirmejo. La patrino restis hejme, preparante akvon kaj forprenante la fenestrojn kontraŭ la ebla aeratako. Ni reciproke adiaŭis, svingante manojn, kaj tio estis la eterna adiaŭo inter ni.

Le 9 août dans la matinée une sirène nous prévint d'une attaque aérienne mais je ne voulais pas aller à l'abri et je jouais dans la maison à côté de maman. Elle me dit "Je pressens qu'aujourd'hui aura vraiment lieu une attaque aérienne" et elle nous pressa, moi, ma jeune sœur de 8 ans et un neveu d'un an d'aller à l'abri. Ma maman resta à la maison préparant de l'eau et ouvrant les fenêtres contre la possible attaque aérienne. Nous nous sommes dit au revoir en agitant les mains et...ce fut notre dernier adieu.

Post iom da tempo la alarmo estis nuligita. Knaboj gaje ekstereniris. Mi, mia fratino kaj la nevo restis en la ŝirmejo. Subite lumegis kaj aperis nigraĵo en miaj okuloj. Mi svenis. Tio okazis ja la 11a kaj 2 minutoj. Ni estis en la fundo de la ŝirmejo do ni evitis elmetiĝon de varmega radio . Kiom da minutoj pasis? Mi estis vekita de iu kaj rekonsciiĝis. Tie mi vidis mizeregajn homojn en ĉifonaj vestaĵoj. Tiaj homoj sinsekve eniris en la ŝirmejo . Ili ĉiuj estis tiel vunditaj kaj preskaŭ nudaj, ke mi ne povis rekoni ilin.

Peu de temps après, l'alarme a été annulée. Des garçons sont sortis gaiement. Moi, ma sœur et le neveu sommes restés dans l'abri. Soudain une énorme lumière éblouissante et le noir se fit dans mes yeux. Je me suis évanouie. Il était 11heures 2. Nous étions au fond de l'abri et nous avons évité l'exposition à la radiation ultra brûlante. Combien de minutes passèrent? Je fus réveillée par quelqu'un et je repris conscience. Là je vis des gens dans un état épouvantable, constellés de morceaux de verre sur tout le corps avec des vêtements en lambeaux. D'autres , dans le même état entraient dans l'abri. Ils étaient tellement blessés et presque nus que je ne pouvais pas les reconnaître.

Mi aŭdis kriojn"Panjo, panjo!" kaj subite mi rememoris mian patrinon kaj kriante ekploris. Neniu el mia familio aperis al la ŝirmejo. Kio okazis ekstere? Mi komprenis ke io ne imagebla okazis.

J'ai entendu des cris "Maman, maman!" et soudain j'ai pensé à ma mère et j'ai éclaté en sanglots. Personne de ma famille n'apparaissait dans l'abri. Qu'est-ce qui s'était passé dehors? Je compris que quelque chose d'inimaginable était arrivé.

La aero en la ŝirmejo pli kaj pli malbonodoris kaj sufokis nin. Vespere aŭdiĝis voĉo de mia patro. "Venis Paĉjo!" Tiun momenton, mi kaj mia fratino denove ploregis. Patro diris al ni: "Ne restu ĉi tie. Vi mortus!" Kaj ni ekstereniris. Tie estis monto da kadavroj. Ĉe la enirejo de la ŝirmejo kuŝis brulvunditaj homoj kun pendantaj haŭtoj kaj kun ĝemadoj. Ni paŝis, atentante ke ni ne piedpremu la mortintoj kaj mortantoj.

L'air dans l'abri sentait de plus en plus mauvais et nous suffoquait. Dans la soirée j'entendis la voix de mon père. "Papa était arrivé" A ce moment ma petite sœur et moi avons éclaté de nouveau en sanglots. Papa nous dit: "Ne restez pas ici , vous allez mourir!" et nous sommes sortis. Dehors il y avait une montagne de cadavres. A l'entrée de l'abri gisaient des gens brûlés avec des lambeaux de peau pendants, gémissant. Nous avons avancé en évitant de poser le pied sur les morts et les mourants.

Kiam la patro sciis, ke miaj patrino kaj fratino ne troviĝas, ni iris al la distrikto de mia domo. La distrikto estis en la flamego. En la sekvanta tago ni denove iris al la distrikto. Ni apenaŭ rekonis nian domon dank'al la restinta betona pordo. Inter la ruinaĵoj vidiĝis kadavro. Ĝi estis mia 22-a jara fratino. Mirakle ŝia vizaĝo estis sen vundoj. Post du tagoj ni trovis mian patrinon en la najbara domo. Ni rekonis ŝin per ŝiaj orplakitaj dentoj. Kiam mi tuŝis la nigre bruligitan korpon, ĝi peciĝis. Ni kolektis lignopecojn el la ruino kaj bruligis ilin. Tie kaj ĉi tie estis fumoj de kremaciado.

Quand mon père fut certain que ma mère et ma sœur n'étaient pas là, nous sommes allés au district de ma maison. Il était en flammes. Le jour suivant nous y sommes retournés. Nous avons à peine reconnu notre maison grâce à ce qui restait de la porte bétonnée. Entre le ruines un cadavre apparut, c'était ma sœur de 22 ans. Miraculeusement son visage était intact. Deux jours plus tard, nous avons trouvé ma mère dans la maison voisine. Nous l'avons reconnue grâce à ses dents plaquées or. Quand j'ai touché la corps carbonisé il tomba en morceaux... Nous avons rassemblé quelques morceaux de bois des ruines et nous l'avons incinérée. Ici et là s'élevaient des fumées de crémation.

Mia plej aĝa frato mortis en la maro de Filipinio kiel kamikazo. Mia dua frato, studanta medicinon, tute ne vundiĝis, sed eksuferis pro sangado kaj laksado, kaj vomante flavaĵon, mortis post 4 tagoj. Mia juna fratino, kiu estis kun mi en la ŝirmejo pluvivis. Tamen kiam ŝi estis 18-jara, ŝi estis operaciita je la cekumo kaj la vundo ne fermiĝis eble pro manko de blankaj sangoglobetoj pro la radioaktiveco. Ŝi farigxis tro nervoza pro malbonodoro el la vundo, kaj kiam ŝi estis 19a-jara ŝi mortigis sin sub trajno.

Mon frère plus âgé mourut dans la mer des Philippines comme kamikaze. Mon deuxième frère, étudiant en médecine, n'a pas été blessé mais commença à souffrir de saignements et de diarrhées et, vomissant jaune, mourut 4 jours plus tard. Ma jeune sœur qui était avec moi dans l'abri survécut. Cependant à 18 ans elle a été opérée d'une appendicite et la cicatrice ne s'est pas refermée peut-être par manque de globules blancs du à la radioactivité. Elle déprima à cause des mauvaises odeurs de sa plaie et à 19 ans elle se jeta sous un train!...

Mi komencis paroli pri mia sperto en Nagasaki antaŭ 40 jaroj, ĉar mi ekpensis, ke rakonti tiun tragedion estas devo de postvivintoj. Troviĝas multaj homoj, kiuj ne scias la realon en Nagasaki kaj Hiroŝima

J'ai commencé à parler de mon expérience à Nagasaki il y a 40 ans car j'ai pensé que raconter cette tragédie était le devoir des survivants. Il y a de trop de gens qui ne connaissent pas la réalité de Nagasaki et d'Hiroŝima.

Kiam mi aŭdas iujn elparoli pri ebleco uzi nukleajn armilojn aŭ movon por produkti uzeblajn nukleajn armilojn, mi estas plena de kolerego. Granda urbo povas ruiniĝi per unu nuklea armilo. Eĉ se ni postvivas la katastrofon, ni ne povas vivi homece kun homa digno dum la tuta vivo, suferante pro vundiĝo, cikatroj kaj perdo de siaj familianoj. Ni devas nepre aboli tiajn armilojn.

Quand j'entends certains parler de la possibilité d'utiliser des armes nucléaires ou un mouvement prôner la production et l'utilisation de ces armes, je suis prise d'une immense colère . Une grande ville peut être totalement ruinée par une seule de ces armes. Même si nous survivons à la catastrophe, nous ne pouvons pas vivre humainement et dignement pendant toute la vie souffrant de blessures, de cicatrices et de la perte de nos proches. Nous devons absolument abolir de telles armes.

Tamen estas ne malmultaj landoj kiuj posedas aŭ volas posedi nukleajn armilojn, eble pro senscio pri vera teruro de la nukleaj armiloj. Tiuj kiuj ne povas kompreni kiel granda tragedio ekestos el la uzo de nukleaj armiloj, parolas la uzon senpense.

Cependant, ils ne sont pas rares les pays qui possèdent ou veulent posséder des armes nucléaires, peut-être par ignorance de la véritable horreur de ces armes. Ceux qui ne peuvent pas comprendre quelle grande tragédie ce sera d'utiliser de telles armes, parlent de son utilisation sans réfléchir.

Senscio estas problemo ankaŭ en Japanio. Kiam ni atombombitoj formortos kaj neniu povos rakonti pri la teruro de la nukleaj armiloj, ekestos vera kriso.Tial mi rakontadas mian sperton al lernantoj por semi kontaŭatombomban ideon. Aperas knabinoj en la mondo, kiuj kontraŭas la tergloban varmiĝon kaj batalas por paco. Mi esperas ke, ili ricevante la semojn ,kiujn mi semas, heredos la torĉon de paco kaj abolo de nukleaj armiloj.

L'ignorance est un problème aussi au Japon. Quand nous, les victimes de la bombe atomique aurons disparu et que personne ne pourra raconter l'horreur des armes nucléaires, éclatera une véritable crise. C'est pourquoi je raconte encore et encore mon vécu aux étudiants afin de semer l'idée anti bombes nucléaires. Il y a des filles dans le monde qui luttent contre le réchauffement de la planète et se battent pour la paix. J'espère qu'elles, recevant les graines que je sème, hériteront du flambeau de la paix et de l'abolition des armes nucléaires.

 

 

 

 

 

 

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